Conseils aux parents: bébé ne veut pas manger !

chaise-haute-2 A l’attention des mamans qui s’arrachent les cheveux, chaque soir, devant la chaise haute.

Pour trouver de manière simple quelques pistes d’amélioration, se demander plutôt : mais pourquoi diable voudrait-il bien les manger, mes légumes ?
Parce qu’il a faim !
Question de bon sens : un enfant qui a faim, mange (ou, tout au moins, est apte à manger).
A contrario, un enfant qui n’a pas faim, ne mange pas (sauf s’il est très très gourmand et que c’est très très bon)
Avec la faim, tout nous paraît meilleur, mais sans elle: rien ne nous dit.
Idem, bien sûr, chez nos petits.
Alors, si petit est pendu à vos collants et vous réclame à corps et à cris à manger alors que vous essayez tant bien que mal de lui préparer un babycook’repas digne de ce nom, c’est plutôt bon signe.
Si, dès que vous tendez la main vers le bavoir, il part en courant se réfugier dans sa chambre et que vous le retrouvez vertueusement concentré sur le dernier livre en carton que vous lui avez offert, c’est plutôt mauvais signe…
Objectif n°1 donc : que petit ait faim à 19h (ou à midi). Pour cela, pas de grignotage après le goûter.
Pas si simple quand on sait que « gâteau » est l’un des premiers mots qui sortiront de sa bouche.
Difficile en effet de résister à son petit doigt tendu vers le placard, ses petits yeux tout en demande accrochés aux vôtres et sa petite bouche qui se tord si joliment en prononçant le mot magique…
Pour celles qui se sentent concernées, mon conseil est pourtant de tenir bon.
Si bébé insiste (parce qu’il a l’habitude de grignoter et ne voit pas pourquoi cela devrait changer), expliquez lui, proposez lui de l’eau et, pourquoi pas, détournez son attention vers une activité qui lui plait en attendant le repas.
Attention, le verre de jus de fruit ou le lait sont également considérés comme du grignotage: ils apportent des calories et sont donc des aliments qui, comme les autres,  peuvent couper l’appétit pour le (vrai) repas bientôt prêt. Donc, si possible, de l’eau.
(Bon ok, si petit affamé fait trop pitié: un petit bout de pain…mais toujours « en attendant le reste » !)

Parce qu’il veut faire quelque chose avec vous.

Pitchoune attend que vous vous occupiez de lui. Et d’’autant plus si vous travaillez et le voyez peu dans la journée.
S’il constate que sa résistance à manger provoque chez vous un grand énervement et que vous finissez par vous consacrer entièrement au problème (c’est à dire lui) alors il sera bien sûr tenté de provoquer à nouveau cet état de fait à chaque repas.
Si, au contraire, vous le félicitez et l’encouragez à chaque bouchée et que vous vous détournez de lui s’il ne mange pas (par exemple pour vous occuper de ceux qui, eux, mangent) alors il comprendra que c’est lorsqu’il mange que vous partagez vraiment un moment avec lui et pas l’inverse.
Deux phrases d’illustration : « Oh ! Tu manges, c’est bien ! Tu aimes ? Tu en donnes à maman aussi ? Mummm, c’est bon ! Tu en veux encore ? C’est toi qui te sers… Oups, et oui, tu as raté l’assiette…» Et la seconde : «  Tu ne manges pas ? Ce n’est pas grave, tu mangeras peut-être le plat suivant. Pour l’instant nous, nous mangeons.»
Et au fait: tant pis s’il ne mange pas, il mangera toujours mieux au repas suivant. Les petits peuvent équilibrer leur alimentation sur plusieurs jours, alors pas de panique ! S’il a ses jours « fromage », il aura aussi ses jours « raisins » et ses jours « purée », ses jours « fine bouche » et ses jours « gros mangeur »…

Parce qu’il connaît ou reconnaît l’aiment que vous lui proposez.

Il ne faut pas sous estimer l’inquiétude de l’enfant vis à vis des aliments que nous lui demandons de manger, c’est à dire de mettre dans son corps. Et ce n’est pas rien d’incorporer un aliment ! Si pour nous, le poireau est un légume plus que banal et qui se mange sans risque, pour lui c’est encore une substance blanche et verte, filamenteuse, inconnue au bataillon. Comment peut-il être sûr qu’il peut le consommer, qu’il ne s’agit pas d’un poison ou, pire encore, de quelque chose « vraiment pas bon »?
Si votre conjoint vous ramène une assiette de purée de larves diverses et semi-vivantes (recette empruntée à la Papouasie par exemple), même si il vous assure que le plat est consommable voir très bon,  je doute que votre confiance en lui soit suffisante à vous faire ouvrir grand la bouche et engloutir le tout sans réfléchir. Alors, pour en revenir au poireau, nous ça fait 30 ans qu’on le connaît, pas bébé !
Quelles pistes ? Proposer un maximum d’aliments variés durant la petite enfance, répéter régulièrement les nouveaux aliments sous différentes formes et, si possible, que bébé assiste au parcours des aliments du paniers de course ou du marché jusqu’au mixage de son assiette en passant par l’étape importante de la cuisine. Il est toujours très rassurant pour lui de vous voir préparer ses aliments.

Parce qu’il aime.

L’enfant peut aimer, ou pas aimer, selon les jours. A cet âge, des préférences alimentaires apparaissent mais dépendent aussi de la pluie, du soleil ou et de son humeur du moment. Il peut très bien aimer tel plat un jour et le refuser le lendemain. Il ne faut pas se formaliser de ces sautes de « goût » toute naturelles à cet âge, ne pas les enregistrer comme étant définitives, et surtout éviter les classements et conclusions hâtives dans lesquelles il pourrait bien vouloir s’identifier par la suite : « il est comme son pana, il n’aime pas les courgettes ! ».
De plus, contrairement à certaines idées reçues, nos petits sont grands gourmets : ils sont bien souvent ravis par des goûts forts (vinaigre, épices, fromages…) et apprécient tout particulièrement les petits plats bien mitonnés de leurs parents. Alors, à vos condiments !
Question sel cependant : il est déconseillé de saler avant 12 mois. Ensuite, il faut encore le limiter à la cuisson par exemple et éviter de resaler par la suite.

Parce qu’il veut faire partie du clan…

L’imitation est un des outils de l’apprentissage chez le tout petit. Avant 18 mois, bébé veut manger comme ses parents car il a confiance en eux et donc en ce qu’ils mangent. Ou tout simplement : faire comme eux pour être comme eux. Alors rien de mieux pour donner envie à un tout petit de manger sa purée de légumes que de la consommer devant lui et d’attendre qu’il en réclame ! Si, au contraire, l’enfant voit son père grimacer devant l’assiette de purée et surtout ne la goûte pas avant de la lui donner, peu de chance pour que bébé se laisse tenter lui-même.
Tant que faire se peu, l’idéal est toujours de partager le repas de son enfant et que lui même puisse partager le votre. C’est comme cela que se transmettent nos modes alimentaires de générations en générations et depuis des millénaires. Suivons l’exemple…
Et juste un petit mot sur les petits pots. Ils sont bien pratiques parfois il faut le reconnaître et « adaptés aux besoins de votre enfant » comme l’indique fièrement l’étiquette. Mais pour ceux qui seraient tentés de donner exclusivement des petits pots à bébé : lorsque celui-ci se rendra compte qu’il est bien le seul à la maison à en consommer, il risque fort de se poser des questions ! Et de finir par les refuser, malgré toute la confiance qu’il vous porte…

Parce qu’il veut faire comme les grands

Le repas est un important moment d’apprentissage pour l’enfant : découverte du goût certes, mais aussi un très bon exercice de motricité fine (et oui, pas facile de manger la soupe avec les doigts…) et d’autonomie. Il est donc important de le laisser faire ! Même si ce n’est pas très rapide (est-on vraiment pressé ?) Même si ce n’est pas très propre (adopter la tenue bavoir intégrale peut s’avérer judicieux).
Et lorsque ses tentatives de mise en bouche de la cuillère sont enfin couronnées de succès, quelle fierté devant maman ! Et bien sûr, viendra avec l’envie de recommencer. Il a donc besoin, comme pour tout d’ailleurs, de la patience de maman, et surtout de ses encouragements. Et parfois, je l’admets, d’un peu de son aide aussi, si c’est vraiment trop long… (il a faim, tout de même, cet enfant)

Parce qu’il est content

Le repas est aussi un moment ou l’enfant peut refuser de communiquer et de partager car il veut vous montrer qu’il n’est pas content. A nous de l’entendre et de l’accepter.
Imaginez devoir manger en face de quelqu’un avec qui vous venez de vous disputer très fortement. Surtout si c’est lui qui vous a finalement imposé sa décision (alors que, bien sûr, c’est vous qui aviez raison), n’auriez-vous pas du mal à avaler le morceau ? Il vaut donc mieux éviter de débuter le repas sur une note de discorde avec votre enfant car son seul moyen sera de vous « punir » en ne mangeant pas ce que vous avez préparé pour lui.

Parce qu’il n’a rien de mieux à faire…

Et oui bien sûr, si il sait que son refus de manger se soldera par le retour immédiat à la liberté (genre rejoindre grand frère affalé la télé?), alors pourquoi ne pas zapper le repas et signifier à maman qu’on a plus faim ?

En conclusion,


S’il est un des privilèges de l’espèce humaine de pouvoir « manger sans avoir faim et de boire sans avoir soif » comme l’écrivait Brillat Savarin, il l’est également, et au grand désespoir des mamans, d’être capable ne pas manger même si l’on a faim ! Bon, surtout lorsque ce qui est proposé ressemble à des légumes, tout bio, frais ou babycookés qu’ils puissent être…

J’espère que ces pistes se révèleront utiles à quelques parents, même si, en matière d’enfants, tout reste toujours plus faciles à dire qu’à faire !

Anaïs Laffond – Diététicienne Nutritionniste Paris